Livres

Ein Brera, de Lisa Giraud Taylor (chronique et interview)

Il y a des romans qui font réfléchir. Ein Brera de Lisa Giraud Taylor fait incontestablement partie de ceux-là. Le livre raconte l’histoire de Béatrice Mercier-Charbonet qui se retrouve confrontée à des révélations difficiles concernant son grand-père.

Ein Brera fait partie d’un triptyque sur le devoir de mémoire. Le premier opus, Karl et Nina, est sorti l’an dernier. Il est important de souligner que les trois ouvrages se lisent indépendamment. Contrairement aux livres 1 et 3, Ein Brera se déroule à notre époque et est très ancré dans le monde actuel.

Alors que nous suivons la rencontre limite magique entre Béatrice et Noah, le coup de grâce est asséné par la mère de ce dernier qui dévoile les activités immorales de son grand-père lors de la Seconde Guerre mondiale. Ce livre est un somptueux mélange d’amour, de passion, d’histoire, de suspens et de résilience.

Il y a fort à parier que les fans d’Histoire vont se régaler. Quant aux autres, ne craignez pas l’ennui car l’auteure Lisa Giraud Taylor est parvenue à livrer une histoire bouleversante servie par un rythme incroyable. En toute sincérité, ce n’est pas mon genre littéraire de prédilection. J’apprécie notamment les tranches de vie des romans français contemporains. Mais j’ai adoré Ein Brera, roman sur lequel je suis très fière d’avoir travaillé (j’ai notamment été la correctrice).

Ein Brera traite parfaitement de la complexité des relations humaines mais aussi de l’impact que nos ascendants ont sur notre quotidien. Les faits et agissements d’un membre de notre famille peuvent potentiellement nuire à notre vie.

Ce roman est vraiment remarquable. La plume de Lisa Giraud Taylor vous embarque totalement. On suit le quotidien, les interrogations, les doutes, le désespoir et l’incompréhension de Béatrice. Nous sommes auprès d’elle dans chacune de ses aventures et découvertes. Même s’il n’est pas toujours évident de la comprendre de prime abord, sa personnalité se dessine parfaitement au fur et à mesure des pages et nous comprenons son entêtement.

Béatrice est un personnage cohérent, crédible et attachant. Elle est entourée de collègues et de membres de sa famille tout aussi intéressants. Ce texte intelligent est admirablement servi par une histoire d’amour des plus romanesques. Noah et Béatrice forment un couple passionné et si touchant.

Ein Brera est un très beau livre qui aborde très justement le devoir de mémoire concernant les atrocités innommables commises pendant la Seconde Guerre mondiale. Tout cela se transpose très justement aujourd’hui… Ou l’importance de ne pas oublier. A lire !

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Résumé

Béatrice Mercier-Charbonet, spécialisée dans la protection des grands patrons, doit se rendre en Israël, suite à l’enlèvement de son PDG par des « contestataires anti-finances », pour négocier. Arrivée sur place, elle est prise en charge par Noah, policier de la section anti-terroriste du Shin Bet. Le trajet d’une heure se transforme en cinq heures. Leur rapprochement est fulgurant. Elle, quarante-cinq ans, est divorcée. Lui, quarante-six ans, vient de divorcer de son premier amour. Lors d’une présentation à la famille de Noah, le passé du grand-père de Béatrice, lors de la Seconde Guerre mondiale, va faire éclater cette romance et amener Béatrice à affronter le devoir de mémoire lors d’une longue traversée du désert.

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Interview de Lisa Giraud Taylor

Pouvez-vous vous présenter ?

Bonjour, je m’appelle Lisa Giraud Taylor et j’aime me définir comme une artiste à grande tendance auteur. En effet, non seulement je suis un auteur de romans, de biographie ou encore de monographie mais j’écris des chroniques sur mon blog, des articles sur la musique ou le cinéma, j’anime deux émissions de radio et je suis également photographe…
Je sais dessiner, crocheter, coudre, et cuisiner… Ce qui fait de moi, une artiste dans l’âme.

Pour la petite histoire, je suis née à Marseille mais j’ai grandi en Périgord et j’y suis très attachée et j’ai une histoire d’amour avec Liverpool.

Ein Brera fait partie d’un triptyque. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Depuis des années (disons une bonne quinzaine d’années), j’ai cette idée sur le devoir de mémoire, dans sa version actuelle ; celle que j’appelle le Triptyque : trois volets liés par un personnage.
Le premier volet, paru en 2017, sous le nom de « Karl et Nina » décrit certaines relations entre la population française et les soldats allemands et, entre les Français eux-mêmes.
« Ein Brera » est centré, notamment, autour du passé d’un homme et les conséquences sur les descendants héritant de la responsabilité et la culpabilité.
Enfin, le volet trois revient à la source en traitant de la période 1928-1937 en Allemagne (à paraître en 2019).

Pourquoi cet intérêt pour la Seconde Guerre mondiale ?

J’ai toujours été sensible aux deux Guerres mondiales, et, par curiosité, autant que par goût certain pour l’Histoire, mon penchant s’est focalisé sur la Seconde. Probablement parce que mes grands-pères, oncles et cousins m’ont raconté leurs versions de cette guerre, que cela soit dans la Marine, les blindés, dans les maquis ou au cœur d’une petite ville en résistant discrètement.
J’ai toujours ressenti, malgré le fait que ma famille n’a pas été directement impactée par des pertes humaines, que je me devais de comprendre, d’appréhender, d’expliquer comment tout ceci avait pu engendrer un tel chaos, un tel massacre, de telles souffrances.
Ma sensibilité a fait que je me suis documentée, très jeune, sur la période 1919-1947 en Allemagne, lisant, visitant, ou tout simplement interrogeant des personnes ayant eu l’occasion de vivre, d’un côté ou d’un autre, les affres de cette guerre. Depuis mes douze ans, je recherche, lis et collectionne tout ce que je peux trouver sur des points particuliers qui ont forgé, petit à petit, ce triptyque.

Le titre de votre roman, Ein Brera, est un pari risqué. Pourquoi ne pas avoir choisi un titre en français ?

Risqué, je ne pense pas. Intrigant, sûrement. Il fallait que le titre de ce roman ait du sens pour l’histoire. Il évoque à la fois les première et troisième parties. Il fait également le lien entre « Karl et Nina » et le volet 3 (qui possède également son titre). C’est un ensemble.
Ce titre est tiré de l’hébreu et d’une expression un peu « risquée », retransmise phonétiquement. J’ai aimé sa sonorité et sa signification immédiatement. Je n’avais aucun autre titre possible. Quand j’ai trouvé cette expression, je n’avais que le début du roman ; une fois entériné, le roman a été d’une facilité totale à écrire.
Chacun peut donc le comprendre et l’interpréter comme il voudra, avant ou après la lecture, puisqu’une traduction est donnée dès la page de garde.

Combien de temps a duré l’écriture du livre ?

Pour être honnête, trois mois, documentation comprise ! Il était tellement évident, comme « Karl et Nina » et le volet 3, que je n’ai eu aucune difficulté à le rédiger (comme tous mes romans d’ailleurs !). J’ai passé un an pour les trois volets, sachant que j’ai un travail à plein temps et des activités familiales et artistiques annexes.
Autant dire, pour compresser au mieux, c’est de l’ordre de six mois de travail, à raison de quatre heures par jour… Cinq jours sur sept, pour les trois !

Est-ce que Béatrice, le personnage principal, vous ressemble ?

Absolument pas ! Aucun de mes personnages féminins ne me ressemble ! Je dirais même que l’on peut me trouver plus facilement dans certains garçons décrits ! Béatrice possède beaucoup de choses que je n’ai pas, ou plus. Seul son désir de mémoire, de quête nous unit. Même si je n’aurais pas forcément eu son abnégation… Pas de ce calibre-là ! Je n’ai pas de vocation de martyr.

Quels sont vos livres préférés ?

Il y a tellement de livres dans mes bibliothèques, de livres qui m’ont procuré un bonheur absolu, un émerveillement et une évasion, que cela ne peut qu’être difficile à dire.

J’ai pour habitude de citer ces six-là qui, pour des raisons personnelles, sont liés à ma vie, à ma pensée, à ma ligne de conduite :
« Le Grand Meaulnes » d’Alain-Fournier
« Cent Ans de Solitude » de GabrielGarcia Marquez
« Eureka Street » de Robert McLiam Wilson
« Quatre Lettres d’Amour » de Niall Williams
« Jacquou le Croquant » d’Eugène Le Roy
« Dans la Forêt » d’Edna O’Brien (à égalité avec « La Chorale des maîtres bouchers » de Louis Erdrich).

Mais j’ai, aussi, une passion pour les livres d’Histoire (étonnant, non ?).

Quel roman injustement méconnu voudriez-vous faire découvrir aux lecteurs ?

Il y en a quelques-uns, mais je citerai l’un des derniers pour lequel je me suis emballée : « La tache verte – et si la vie végétale n’existait plus qu’au Pays des mille étangs  » d’Anne Labbé paru en 2013 chez Alice Lyner Editions. Un bien beau « conte » en faveur de l’humanité, la planète, des animaux, des hommes, d’amour et ce joli lien qui nous unit tous, ici-bas.
Une rencontre humaniste, autant que l’auteur qui est une femme étonnante (que je présenterai bientôt sur mon site officiel).

En ce moment, que lisez-vous ?

En ce jour, je navigue entre trois livres « Les Derniers Jours du Nouveau-Paris » de China Miéville, « La Dame de Reyjavik » de Ragnar Jonasson et mon habituel « pavé » d’Histoire (le tome 3 de « Auschwitz et après » de Charlotte Delbo).

Quels sont vos projets ?

Promouvoir « Ein Brera » au mieux, continuer à présenter mon travail sur Louis Geandreau en congrès historiques (j’ai, notamment, postulé pour un appel à projet du 144e congrès national des Sociétés historiques et scientifiques qui se déroulera en mai 2019), sortir le volet 3 en 2019, continuer à faire de la radio… Et participer aux ateliers du Labo des Histoires PACA avec qui je suis en relation.
Sinon ? Attendre avec impatience les vacances de Noël pour aller au cinéma et bouquiner (encore plus)…
Ah oui, écrire encore, mais j’ai quatre romans prêts à être publiés (et qui sont encore complètement différents des précédents !), donc j’ai de la marge…

Pour suivre l’actualité de Lisa Giraud Taylor, rendez-vous ici :
http://lisagiraudtaylor.com/
https://www.facebook.com/lisagiraudtaylor/

Ein Brera – Etes-vous sensible à ce sujet ?

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4 Comments

  • Reply
    Lisa Giraud Taylor
    5 novembre 2018 at 12 h 23 min

    Ohhhh merciiii :) <3 <3
    Je suis ravie de travailler avec toi et je suis heureuse que ce roman soit entre les mains de tes lectrices….
    Bonne lecture pour le volet 3 (bientôt :) !)

    • Reply
      Fanny
      5 novembre 2018 at 12 h 27 min

      J’ai hâte !
      <3 <3 <3

  • Reply
    tinalakiller
    5 novembre 2018 at 20 h 00 min

    Très chouette interview !
    (j’aime bien le concept du triptyque !).

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